Dans le grand stade de football, la foule gronde… Des «supporters» crient, hurlent, vocifèrent…

Des injures pleuvent sur l’arbitre, des joueurs sont pris à partie; divers objets lancés depuis les tribunes accompagnent les menaces…

La violence, la haine même, se déchaînent, et c’est alors, que la commentatrice de la radio fait cette stupéfiante déclaration :

«Ils ont payé leur place, alors ils ont droit…»

Incroyable raisonnement, si raisonnement il y a ! Terrible démagogie, propos redoutables pour tous ceux qui écoutent, et en particulier les jeunes !

Il est vrai que de plus en plus de terrains de sport sont devenus en quelques années des lieux où l’agressivité se donne libre cours, quand elle n’est pas cultivée.

Sur le terrain même, l’antijeu, les actes défendus se multiplient… les blessés aussi !

Et l’on voit même des joueurs de tennis, hommes ou femmes, brandir le poing, le visage durci comme s’il s’agissait d’une mise à mort de l’adversaire.

N’est-on pas alors plus près des arènes où les toros et toréadors s’affrontent en un combat mortel, celles aussi tellement prisées des Romains de l’empire décadent où s’entretuaient les gladiateurs, où coulait le sang des innocentes victimes livrées aux fauves,

que des endroits réservés aux sports, où «en gentlemen», respectueux des règles établies et de l’équipe adverse, s’affrontent en un combat loyal, des hommes et des femmes, maîtres de leurs corps, et désireux de triompher ou acceptant de perdre avec sérénité, et même le sourire.

L’épidémie s’étend et de plus en plus de «grands stades» sont atteints; mais ils ne sont pas les seuls à être gangrenés; de petits stades de banlieues ou de province le sont aussi, même si heureusement, il reste encore des disciplines et des lieux où le mot sportif a gardé tout son sens et où la convivialité et le bénévolat sont la règle.

L’argent corrompt tout ou presque !

Et le sport, comme d’autres domaines de la société, est profondément atteint. Comment pourrait-il en être autrement alors que notre civilisation s’enfonce dans la violence, et que même des écoles sont gravement touchées.

Les peuples qui acceptent que la brutalité, la haine se déversent chaque jour sur les écrans, à la télévision, dans certaines bandes dessinées… ne doivent pas s’étonner de voir l’hostilité et la loi de la jungle s’imposer là où devrait régner l’amitié…

Grillages, stadiers en survêtement, caméras qui scrutent les tribunes, et même des compagnies de C.R.S. deviennent monnaie courante !

«Ils ont payé leur place…»

Non madame, le fait de payer sa place ne donne pas tous les droits !

Cette vision réductrice qui n’a comme référence que l’argent, a causé tant de souffrances, de misère au cours des siècles, qu’il n’est pas acceptable de laisser passer de telles inepties sans réagir !

Aujourd’hui encore, la primauté de l’argent, son idolâtrie, entraînent l’exploitation, la pauvreté, la persistance de conditions inhumaines de vie pour des multitudes.

L’argent ne doit être qu’un moyen d’échange, remplaçant le troc du lointain passé… mais jamais un but, ni une arme pour assujettir et opprimer !

Non plus que pour obtenir force, pouvoir ou influence.

«Avec l’argent, disent les cyniques, on achète tout : joueurs, arbitres, mercenaires, «gens en place», et même les corps et les âmes…»

Heureusement que cela n’est pas toujours vrai.

Il est encore des hommes et des femmes qui ne sont ni à acheter ni à vendre !

Quant au sport, remarquons que s’il est normal que le spectateur, le supporter, ait le droit de s’exprimer, de faire connaître son opinion sur ceux qui se produisent en public, ce ne doit être qu’avec mesure, et dans le total respect de ceux dont il parle…

Et puis la subjectivité, «l’erreur humaine», se trouvent aussi chez le supporter… La modestie s’impose et la passion ne doit pas aveugler, encore moins transformer l’homme en bête furieuse.

Qui sait si le joueur, l’arbitre incriminés ne traversent pas un moment difficile, «une méforme» que nous connaissons tous, «un jour sans…», quelques maux physiques, quelque problème familial ou autres…

Et puis même, s’il n’y a pas d’excuse, n’est-ce pas à l’entraîneur, aux responsables, de juger, d’agir ?

Un grand commentateur sportif notait, face aux événements de plus en plus graves qui atteignent le milieu du sport: «certains publics veulent décider à la place de l’entraîneur… faire et défaire les équipes… lever ou baisser le pouce comme dans les arènes !»

Et il soulignait combien cette dérive est dangereuse.

Quels mauvais exemples pour les enfants et les jeunes… Ce n’est pas étonnant que «les casseurs», les violents, prolifèrent…

C’est toute la société qui est malade, et il faut, comme face à la maladie, établir un diagnostic juste et ne pas se voiler la face, s’abriter derrière des faux ou démagogiques raisonnements, pour ne pas agir, ou faire semblant d’agir !

Dans le sport, il est indispensable de retrouver les valeurs de loyauté, d’altruisme, de respect de l’autre, de partage, de joie saine, de la victoire honnêtement gagnée ou de la défaite sportivement acceptée.

Dans le sport ? Oui, mais pas seulement dans le sport, dans tous les domaines de la vie.

La Bible, le Livre, dit :

«Ce que l’on a semé, on le récoltera».

N’est-il pas plus que temps de revoir les semailles ?

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