Grâce aux lunettes mises au point par la société américaine Vuzix, l’on ne verra peut-être plus demain les étranges symptômes des mystérieux maux dont une partie croissante de l’humanité semble atteinte, surtout dans les pays riches…
Je veux parler de ces foules qui arpentent trottoirs, allées de parcs, et même de grandes surfaces – tous lieux, en réalité – d’une marche erratique, un peu aveugle, soliloquant ou dialoguant dans le vide, pianotant frénétiquement des pouces sur un petit objet bien identifié, la tête penchée sur son écran…
Ou encore ces hôtes attablés au restaurant ou au café, le visage rivé – non sur leur assiette où refroidit le plat servi – mais sur leur mobile, leur Smartphone ou leur tablette, souriant béatement à l’objet en question, ou le visage animé de curieux tics et expressions…
Pour ne rien dire de ces myriades d’ados assis ou debout, immobiles, mais le corps parcouru de spasmes quasi épileptiques, les doigts mus par une agitation frénétique… les yeux, eux aussi, braqués sur un écran.
Bref, peut-être tous ces symptômes d’une génération gravement marquée par les stigmates de «l’homo connectus», formaté par l’évolution numérique, auront-ils bientôt disparu… ou auront-ils laissé place à plus inquiétant encore ?
Car grâce à Vuzix, donc, et à son avatar technologique, les lunettes hyperconnectées, ce sont les verres desdites besicles qui font fonction d’écran, garantissant pour tous un regard irrémédiablement perdu dans le vague, frappé de myopie.
Ces binocles Vuzix, connectées au Smartphone que l’on a en poche ou dans un sac à main, permettent, en pianotant sur leurs branches, d’afficher mails et SMS, de surfer sur les applications, de prendre des photos (etc.) !
Merveille de la technologie déshumanisante, qui transformera vos moments de convivialité en dialogue de sourds, et votre interlocuteur en aveugle, ou en zombie au regard glauque, plus bovin que les vaches regardant passer les trains, car vous contemplant sans vous voir, et vous écoutant sans vous entendre, occupé qu’il sera à regarder passer ses trains de SMS…
L’on nous dit et redit «lien social», «Réseaux sociaux»… et l’on nous fabrique un homo-ex-machina !
L’on nous parle «détox» numérique, et l’on nous livre de l’intox au «progrès»…
Heureux les hommes libres ! Ceux-là voient plus loin que le bout de leur nez, fût-il porteur de lunettes.