Des tireurs embusqués, prêts à abattre au premier signe de résistance des Indiens qui protestaient contre l’ouverture d’un vaste chantier sur le territoire de leur réserve…

Non, ce n’était pas la scène d’un western, ni un épisode historique de la conquête de l’Ouest, mais un événement qui a ému le Canada – le temps d’un «buzz médiatique» – début 2019, et amené l’ONU à condamner l’Etat canadien, en janvier 2020, l’accusant de discrimination raciale envers ses «peuples premiers» – ainsi que les Amérindiens se nomment eux-mêmes…

Voici les faits, dignes de l’époque où se construisaient à travers l’ouest américain les lignes de chemin de fer transcontinentales : 

en 2018, la société Coastal GasLink Pipeline Ltd. est autorisée à construire un pipeline de 670 kilomètres d’Est en Ouest à travers la Colombie Britannique, afin d’atteindre un terminal méthanier sur la côte du Pacifique. Un chantier qui représente 6,6 milliards de dollars d’investissement, dont 275 millions provenant de l’Etat canadien…

L’une des tribus amérindiennes –les Wet’suwet’en– dont le territoire va être impacté, s’oppose pacifiquement au chantier en établissant un barrage: elle demande à être consultée sur le trajet du pipeline…

Mais en fin 2018, le jugement d’un tribunal canadien autorise la Coastal GasLink à faire évacuer les opposants par la force, manœuvre confiée à la Gendarmerie Royale du Canada, qui emploie la manière forte – opération particulièrement «musclée», selon les observateurs – pour déloger et arrêter les Indiens entre le 7 et le 14 janvier 2019…

Emotion et indignation dans le pays… pour quelques jours.

Et l’on en serait resté là si une enquête du journal anglais The Guardian n’avait confirmé, un an après, un bruit qui courait à l’époque : la Gendarmerie Royale du Canada avait bien posté sur place des snipers, appelés à tirer en cas de résistance des Indiens, qui avaient eux-mêmes repéré la présence de ces tireurs embusqués…

Stupéfaction au pays du très jovial et «moderniste» premier ministre Justin Trudeau ! Et effarement en ce début du XXIe siècle !

Mais doit-on vraiment s’étonner ?

L’histoire rappelle à longueur de siècles et de millénaires, que ni l’écoulement des siècles, ni les civilisations ou cultures, ni les plus beaux discours ou belles devantures n’affranchissent l’être humain de ses «vieux démons»…

Surtout quand l’argent, le pouvoir, les intérêts entrent en jeu !

Une maxime populaire dit que «le savoir-vivre est un vernis qui se dilue dans l’alcool»; l’on pourrait dire en la parodiant que «l’humanisme» – comme les Droits de l’homme – est une grande idée et un beau principe qui se diluent bien souvent dans l’appât du gain et du pouvoir.