Le pasteur Christian Galtier

Le Pasteur Christian Galtier, Directeur Général de la Fondation John Bost, nous a très fraternellement accueillis à La Force en Dordogne, principal site de la Fondation, pour un reportage sur cette grande et ancienne œuvre protestante.

Outre un long et riche entretien, il a bien voulu nous guider dans une visite éclairante et émouvante de ces lieux dont le visiteur attentif ne peut revenir totalement tel qu’il y est entré; lieu de profonde humanité, et lieu d’Evangile…

Voudriez-vous vous présenter en quelques mots ?

 «Né dans une famille protestante, j’ai entendu parler de la Fondation John Bost dans ma petite enfance, à une époque où l’on parlait encore des «Asiles de La Force».

Je n’avais a priori aucune prédisposition pour venir diriger cette institution. J’ai rencontré le handicap en tant que jeune parent, puisque le deuxième de nos cinq enfants est polyhandicapé…

J’ai d’abord fait des études scientifiques et techniques, en Génie mécanique. Puis, ayant eu la conviction que cela ne m’occuperait pas toute ma vie, j’ai rencontré, dans le cadre du scoutisme, des personnes qui m’ont amené à percevoir que j’étais peut-être appelé au ministère pastoral.

J’ai donc effectué des études de théologie. Mon premier poste a été dans le scoutisme ; Secrétaire Général des Eclaireurs et Eclaireuses Unionistes de France…

Après cinq ans à ce poste, j’ai été pasteur à Nîmes, et rapidement l’on m’a demandé de devenir Président du Conseil régional de l’Eglise réformée pour les Cévennes, le Languedoc et le Roussillon.

Puis, après deux mandats, j’ai été appelé à venir  diriger la Fondation John Bost, où je suis depuis 18 ans.»

Comment définiriez-vous, à grands traits, ce que fut la «vision» de John Bost pour créer puis développer l’œuvre de La Force ? Quelle a été voici plus de 170 ans l’originalité de cette œuvre et en quoi son accueil des personnes très handicapées fut-il précurseur, en avance – et de beaucoup – sur son temps ?

«John Bost était né dans un protestantisme pacifié, libéré des persécutions, qui pouvait – après la Révolution et le Concordat – penser aux plus fragiles des siens, et il a vécu sa jeunesse dans un environnement évangélique. Il était évident pour lui que son action ne pouvait être référée qu’au Christ.

 Sa première intuition a donc été de dire : «J’accueillerai ceux que tous repoussent, au nom de mon Maître…», ce Maître étant bien évidemment le Christ.

Il ajoutait: «dans un environnement sans murs ni clôtures», se posant là en totale rupture avec les pratiques et les recommandations – y compris légales – de l’époque, puisque la loi de 1838 promulguait l’ouverture des asiles psychiatriques départementaux sur le modèle carcéral. John Bost a fait, lui, le «pari» du modèle totalement ouvert !

Il y a là comme un esprit de liberté, un mouvement prophétique, selon le mot employé pour le titre d’un ouvrage sur La Force : «La cité prophétique»…

Sa troisième idée était que le beau aide les gens à aller mieux, ce qu’il a formulé dans une affirmation forte : « … Nous mettrons des fleurs sur leur  chemin.»

Musicien, il s’était, par exemple, aperçu que la musique aidait les épileptiques à aller mieux, et plus généralement que le cadre dans lequel les gens étaient appelés à vivre avait une influence, pour leur mieux-être ou leur mal-être selon qu’il était propre, harmonieux ou au contraire laid, mal entretenu… Trois intuitions donc : «Ceux que tous repoussent, je les accueillerai au nom de mon Maître, dans un environnement sans murs ni clôtures, et nous mettrons des fleurs sur leur chemin.»